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Les Mathématiques et la Finance : un couple à repenser !

lundi 28 novembre 2011 par Georges Vallet


En physique, lorsqu’une expérience contredit une hypothèse, on change l’hypothèse. Pas dans le monde de la finance.

Les Mathématiques sont à l’honneur ; provisoirement, car elles ne sont pas, généralement, la tasse de thé de nos compatriotes ; pourtant, étymologiquement, ceux « qui aiment apprendre » devraient s’y intéresser ! On les a évoquées à la Fête de la Science. Dans un numéro Hors-série de Sciences et Avenir un article intitulé : « Les folles croyances de la finance » en développe une face cachée. Bien sûr, la complexité est telle qu’il n’apporte pas la solution de nos problèmes actuels mais un élément d’information non négligeable et peu médiatisée ; les sources étant sérieuses, cela me semble intéressant d’en parler.

À la spéculation, aux colossales dépenses militaires (rafale, arme atomique, campagnes extérieures), au nucléaire civil.., s’ajoute, dit-on, une perte de confiance des marchés car il y a trop de malades, d’infirmières, d’enseignants, de policiers... !!! « Et si la crise des Bourses était un problème de maths ? Si le krach s’expliquait avant tout par le choix des modèles de calcul et de prévision dont usent les professionnels des marchés ? Selon cette hypothèse, une modélisation inadaptée aurait conduit les acteurs financiers à une colossale erreur de jugement, chiffrée aujourd’hui à plus de 1000 milliards de dollars ! »

Au début du XIXè siècle, le botaniste Robert Brown observe qu’à la surface d’un liquide, les grains de pollen se déplacent de manière désordonnée. Au microscope, le cytoplasme d’une cellule, montre un phénomène semblable au niveau des particules. En 1905, Einstein donne une description mathématique de ce mouvement dû à la collision des molécules, c’est le mouvement brownien, type de processus aléatoire. La théorie des probabilités se développa et initia les mathématiques financières.

Avant le krach de 2007, les experts du F.M.I estimaient que la croissance mondiale resterait vigoureuse en 2007 et 2008. En 2008 : « Les élégants modèles de prévision ont été une fois de plus incapables d’anticiper une crise financière ou le début d’une récession », Président de la banque centrale des Etats-Unis. ! Michel De Pracontal apporte quelques arguments explicatifs à cette incapacité récurrente. 

1°)« À la différence des Sciences de la Nature, l’économie et la finance ne s’appuient pas sur des principes validés par l’expérience mais sur des axiomes qui tendent à devenir des dogmes » Jean-Philippe Bouchaud professeur à Polytechnique. Le système est resté adepte de la « main invisible » inventée par Adam Smith.(1755) « On peut difficilement imaginer que l’impressionnant déploiement de transactions qui caractérisent le marché mondial actuel pourrait produire la relative stabilité économique que nous expérimentons chaque jour si ces transactions n’étaient pas guidées par une version planétaire de la main invisible de Smith. » Alan Greenspan en 2005. La transcendance n’est pas loin !!
Cette conception est la justification de l’ultralibéralisme et de la dérégulation. « La foi » des défenseurs du free market n’a été entamée que pendant la brève période de la crise des subprimes. Passé l’orage, le système est reparti comme avant. En physique, lorsqu’une expérience contredit une hypothèse, on change l’hypothèse. Pas dans le monde de la finance.

2°) La majorité des outils mathématiques utilisés en finance, comme d’ailleurs dans de nombreux autres domaines, comme la sécurité, nucléaire par exemple, est conçue pour des situations normales, proches de l’équilibre, et non pour des évènements extrêmes loin de l’équilibre. Pour Louis Bachelier, l’évolution d’un cours de la Bourse est semblable à la trajectoire d’une particule animée par un mouvement brownien, un processus probabiliste. Or, si ce processus est bien aléatoire , il s’agit d’un « hasard sage » où l’ensemble des déplacements fluctue autour d’une moyenne. Cette conception ne tient pas compte des événements extrêmes Elle est devenue la clé de voûte de la théorie financière. Par exemple,. « l’agence de notation Moody’s se sert d’un modèle brownien pour établir ses notes. » !

Benoît Mandelbrot, franco-américain, développa les fractales, il met en garde, dès 1961, les théoriciens de la finance en expliquant que les marchés réels étaient régis par un hasard « plus sauvage » que celui des modèles browniens. Sa théorie financière tient compte de la survenue des variations (risques) extrêmes. « Si Lehman Brothers avait établi ses calculs avec des processus de Lévy, la banque aurait distribué de plus faibles dividendes à ses actionnaires et se serait assuré plus de « coussin » de fonds propres ». Au total, la crise aurait été moins grave en utilisant des modèles plus contraignants que le mouvement brownien. Reconnue pertinente, elle a été mise de côté. Pourquoi ? Spinoza avait-il raison ? : « Toute institution a tendance à persévérer dans son être » !
Pour Mandelbrot : « Ceux qui qualifiaient mon travail de brillant pensaient qu’il ne s’appliquait qu’à une situation chaotique qui avait prévalu au XIXe siècle mais avait cessé de s’appliquer depuis qu’on avait appris à gérer l’économie » !

3°) « Les modèles de la finance sont faits pour fonctionner dans des situations ordinaires, non pour des périodes de surchauffe où les comportements sont irrationnels » Nicole Karaoui, Université P .et Marie Curie. Par exemple, David Li,, de la Banque J.P.Morgan Chase, a mis au point des titres fabriqués en agrégeant les créances d’un grand nombre de prêts, parfois des centaines ou des milliers ! L’astuce brownienne repose sur l’hypothèse qu’il est improbable qu’un grand nombre d’emprunteurs fassent défaut en même temps. Des titres ont été fabriqués avec des créances immobilières, des crédits auto, étudiants, des dettes de cartes bancaires etc...Tout a été pour le mieux jusqu’au jour (éclatement bulle immobilière) où il y eu défaut de tous les débiteurs ! On était passé du hasard sage au sauvage qu’on n’avait pas prévu de gérer !  

Choix d’outils mathématiques non pertinents, persistance de ne rien vouloir changer, ainsi va le monde financier, et notre destin ! Pourtant : « Nous sommes bel et bien entrés dans une autre phase de l’histoire humaine. Mutations économique, géopolitique, technologique, écologique, tout s’est passé en même temps. » Jean-Claude Guillebaud

Le free market a vécu, les dogmes volent en éclats, une autre voie est à ouvrir en repartant sur d’autres axiomes ; qui aura le courage politique ?
« Il est plus difficile de modéliser la folie des hommes que le mouvement des planètes » Isaac Newton.


- une compilation de Georges Vallet

Source : Sciences et Avenir :Hors série : le pouvoir infini des Mathématiques, 2011
Nel. Obs 2008
(1) Cefra : centre de recherche sur le risque ; école de management de Lyon .
(2) Christian Walter et Eric Brian, « Critique de la valeur fondamentale » 
(3) Olivier Le Courtois et François Quittard-Pinon,« Asia-Pacific Financial Markets », Springer Netherlands, 2006
et G.Vallet

crédit photo : Mouvement brownien et sa dimension fractale/G.Vallet 


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