Un intéressant article du Monde fait le point sur l’immobilier en Espagne. cela ne va pas fort.
En Espagne, le nombre des constructions a fortement diminué LE MONDE | 19.04.08 | 14h45 • Mis à jour le 19.04.08 | 14h45
Le crédit facile et peu cher auquel les Européens et les Américains se sont habitués depuis dix ans a alimenté une inflation sans précédent des prix de l’immobilier. Comparée à l’évolution des revenus, cette hausse est devenue insupportable et, conjuguée au resserrement du crédit, elle provoque un ralentissement, parfois brusque, des marchés.
Euler Hermès a identifié trois pays où les facteurs de tension sur les prix de l’immobilier sont les plus tangibles : le Royaume-Uni, l’Irlande et surtout l’Espagne, dont l’économie est très dépendante du secteur de la construction ; celui-ci compte pour 13 % dans le produit intérieur brut (5,5 % en France) et emploie 18 % des salariés.
Un ménage espagnol paye très cher son logement, dont le prix moyen a augmenté de 234 % depuis 1996 et représente aujourd’hui, toujours selon Euler Hermès, 5,2 fois le produit intérieur brut par habitant, contre 4,4 fois en Italie et au Royaume-Uni, 3,4 fois en Irlande et en France, et 2,7 fois aux Etats-Unis. Les Espagnols sont parmi les plus endettés d’Europe, avec un encours de crédit représentant 135 % de leur revenu brut : moins que les Britanniques (167 %) ou les Irlandais (143 %) mais plus que les Français (75 %).
DES MILLIERS D’AGENCES FERMÉES Malgré 651 000 logements mis en chantier en 2007, la construction a chuté de 19 % par rapport à 2006, et les prévisions pour 2008 ne dépassent pas 400 000 unités. Des milliers d’agences immobilières ont fermé. Au premier trimestre, une quarantaine de promoteurs espagnols ont été déclarés en cessation de paiement ou ont suspendu leur activité. "Il s’agit surtout de petits promoteurs, certains spécialisés dans la résidence secondaire, qui représente ici 28 % de la construction de logements neufs", explique Jean Tavernier, directeur général de Premier, filiale hispanique des Nouveaux Constructeurs : "Ils s’endettent lourdement pour acheter de vastes terrains agricoles, en vue de les transformer en parcelles constructibles et de s’enrichir rapidement." Les poids lourds du secteur (Martin Fadesa, Vallehermoso...) enregistrent aussi une baisse de leurs ventes mais résistent car ils ont su se diversifier et s’établir à l’étranger. "Les difficultés de paiement des promoteurs vont mettre à mal les banques, notamment les plus petites", craint Laurent Bonhoure, d’Euler Hermès.
Le marché de l’ancien accuse aussi le coup, selon des chiffres du ministère espagnol du logement publiés le 18 avril. 828 000 transactions ont été conclues en 2007, soit 14 % de moins qu’en 2006 et, pour la première fois depuis dix ans, les prix, en progression de 4 % sur les douze derniers mois, ont augmenté moins vite que l’inflation (4,4 %), donc baissé en termes réels. Le ralentissement est spectaculaire après une hausse qui avait dépassé 18 % en 2004. "Vendeurs et acheteurs sont en position d’attente, devant des prix qui stagnent avant de chuter", prévoit Jean-Michel Sixt, de Standard & Poor’s. Euler Hermès anticipe une baisse de 10 % cette année et ne voit guère de sortie de crise avant 2010.
Les ménages espagnols ne semblent toutefois pas étranglés par leurs remboursements bancaires ; le taux d’impayés, certes en hausse, reste très faible, de 1,056 %. Pour contrecarrer la crise, le gouvernement de José Luis Zapatero a annoncé le 18 avril une série de mesures, d’un montant global de 10 milliards d’euros, incluant des crédits d’impôt et des garanties de prêts ainsi que la construction de 150 000 logements sociaux en accession, au prix inférieur à 2 000 euros le mètre carré.
Isabelle Rey-Lefebvre Article paru dans l’édition du 20.04.08.